Le cycle de vie du plastique pose un double problème : tout n’est pas recyclable, et tout ce qui est recyclable n’est pas recyclé. Mais les pistes pour faire advenir une économie circulaire du plastique, en affinant notamment la qualité des produits recyclés, ne manquent pas.
En matière de recyclage, le plastique est encore loin d’être fantastique. Sur les 25 millions de tonnes de déchets plastiques générés chaque année en Europe, seuls 30 % sont collectés pour être recyclés ; le reste est incinéré ou termine dans des décharges. En France, d’après une enquête du magazine 60 millions de consommateurs en 2018, ce taux n’atteint que 26 %, très loin de l’objectif 100 % de plastiques recyclés en 2025 fixé par le gouvernement.
De quoi abandonner l’espoir d’une économie du plastique réellement circulaire ? Pas si vite : la législation européenne, qui prévoit d’incorporer 25 % de plastique recyclé aux bouteilles en PET à partir de 2025, et 30 % dans toutes les bouteilles en plastique dès 2030, pourrait bien contraindre les entreprises à se mettre sérieusement au recyclage.
Motivés par des enjeux environnementaux — la fabrication d’une bouteille en PET recyclé émet 70 % de CO2 de moins que la fabrication d’une bouteille en PET vierge, et limite naturellement la pollution plastique —, ces objectifs supposent de disposer d’une matière recyclée de très haute qualité, en particulier pour les emballages alimentaires.
Un plastique recyclé comparable au plastique vierge
Aujourd’hui, les centres de recyclage s’appuient majoritairement sur des procédés mécaniques, consistant à broyer le plastique sous forme de paillettes, qui sont traitées et transformées en granulés de plastique dont la qualité est comparable à celle du plastique vierge. Une technique qui permet à Veolia de produire un PET recyclé entrant en moyenne de 50 à 70 % dans la composition d’une nouvelle bouteille, « et demain 100 % », assure Benoit Perreau, directeur adjoint de l'offre Recyclage des Plastiques chez Veolia.
Avec un bémol toutefois : « Hormis quelques exceptions, notamment le PET transparent, il n’est pas possible de faire un produit qui soit agréé pour l’usage alimentaire. Pourtant, il y a une vraie demande ». Pour le PET coloré ou comportant plusieurs couches barrières, et les autres matériaux comme le polyéthylène (présent dans les sacs plastiques) et le polypropylène (utilisé entre autres dans la construction automobile et pour les emballages alimentaires), c’est plus compliqué : « obtenir une résine recyclée comparable au vierge en matière d'aspect est plus difficile », décrit-il.
D’où l’importance de faciliter le recyclage du plastique dès le départ, « en prenant en compte dans la conception de la bouteille sa capacité à être recyclée, c’est-à-dire en n’utilisant qu’un seul type de résine, ou encore en acceptant que la bouteille issue de matériaux recyclés ne soit pas tout à fait transparente…», note Benoit Perreau. Ainsi, le nouvel emballage de pastilles de lave-vaisselle Finish Quantum, issu du partenariat entre Veolia et Reckitt Benckiser (RB), contient 30 % de plastique recyclé et assume tout à fait sa couleur grise (dépourvue de pigments masquants et d’additifs).
Le futur est au recyclage chimique
Pour affiner le recyclage, l’industrie s’attaque désormais aux procédés chimiques. Encore au stade de pilotes ou de recherche, ceux-ci incluent aussi bien la pyrolyse (consistant à chauffer le plastique à haute température pour obtenir un produit pétrolier) que la séparation de matière, utile pour les emballages contenant plusieurs couches de résines différentes.
« Leur objectif est de revenir au monomère, le composant de base, par le biais de différentes technologies », résume Benoit Perreau, en évoquant plusieurs initiatives, comme Carbios, qui mise sur le « biorecyclage ».
Le principe : recourir aux enzymes, des catalyseurs biologiques, pour découper les molécules de PET afin de dé-polymériser le matériau à recycler, le purifier et le re-polymériser, et ainsi recycler le plastique à l’infini. Des techniques qui s’appliquent également aux plastiques en couleur (notamment le PET), que les procédés mécaniques peinent encore à recycler.
« Pour l’instant, l’échelle industrielle n’est pas atteinte pour des raisons économiques le plus souvent et parfois techniques, mais la pression est telle sur les marques pour utiliser du recyclé que le recyclage chimique va forcément se développer rapidement dans les mois et années à venir », prédit le directeur adjoint de l'offre Recyclage des Plastiques chez Veolia. Et de décrire sa vision du plastique de demain : « un emballage mono-matière contenant 100 % de matières recyclées, obtenu en partie grâce au recyclage mécanique, en partie grâce au recyclage chimique. »
Consigne et low tech
« Il y a tout un travail de sensibilisation à faire pour trouver des solutions à terre — et non dans la mer —, au niveau local, à petite échelle et en low tech », poursuit-il en évoquant le projet Plastic Odyssey, qui a pour ambition de transformer les déchets plastiques en carburant (grâce à la pyrolyse) pour propulser un catamaran dans son tour du monde qui devrait débuter d’ici un an. Il s’arrêtera le long des côtes les plus polluées de la planète, où les déchets plastiques seront ramassés, triés et transformés en objets ou matériaux utiles.
« Il y a tout un travail de sensibilisation à faire pour trouver des solutions à terre — et non dans la mer —, au niveau local, à petite échelle et en low tech »
Membre fondateur de l’ « Alliance to End Plastic Waste » créée en janvier 2019, Veolia soutient également le projet Tara, qui organise régulièrement des expéditions aux quatre coins de la planète pour étudier la pollution plastique marine. « C’est un formidable outil de plaidoyer, qui a beaucoup œuvré pour que la pollution soit mieux appréhendée par les décideurs et grandes agences des Nations unies », fait valoir Thierry Vandevelde, en décrivant la dernière mission en date, qui a consisté à identifier et caractériser les flux de la pollution microplastique dans dix fleuves européens. Histoire de rappeler, une fois de plus, l’urgence du recyclage.